La Commune libre de la place de la Bilange des années 50 aux années 60
Historique établi par Mr Jean-Paul Mandegou en 2010 (inédit)
L’intention de Mr Mandegou était de constituer un livre-mémoire sur le défilé fleuri. Mais celui-ci ne vit jamais le jour. Cependant aucun des documents compilés dans ce but n’a été perdu. Ils constituent toujours une des bases de travail de SAUMUR MÉMOIRES DE FÊTES.
La Commune libre de la place de la Bilange, création éphémère, mais ô combien marquante dans la vie de la “Perle de l’Anjou”, la “Commune Libre de la Bilange” est encore évoquée, de nos jours, avec une émotion patente chez celles et ceux qui ont eu la chance d’en connaître les facéties.
Que joie soit loi !
C’est à la suite du défilé fleuri de 1952 que Clément Chudeau “Maistre peinstre, place de la Bilange”, comme il est indiqué dans le cahier d’écolier relatant l’événement et en portant les délibérations et statuts, eut l’idée de créer, le 9 juin, cette structure pas comme les autres.
Le 23 juin 1952, veille de Saint-Jean, s’est donc déroulée la première réunion du Conseil Municipal, présidée par Henri Mesnard, le “Maire Deux” (après celui de Saumur, évidemment) dans la salle du premier étage du “Bar Saumurois”, promu “Mairie officielle”. Se trouvaient donc présents les adjoints, MM.Caillère, Hue, Clément Chudeau et Buisine, le docteur Marty, l’assistante sociale Mme Dubois, le notaire Jacques Conche, le garde-champêtre M. Grellet, le capitaine des pompiers Raymond Chudeau assisté du brigadier Léobon et du sapeur Aumerle, Raymond Dutin le facteur, le chef de la section des bigophones M. Dénéchère, le commissaire de police Claude Hue et le sous-chef de musique M. Jean Chacun. Séance quelque peu avortée puisqu’en l’absence de livraison de la “pompe à incendie”, une superbe machine à bras, modèle 92, Jacques Conche, chargé de l’administration, nota que la séance était levée et reportée à une date ultérieure !
Les statuts de la Commune libre de la Bilange
Néanmoins les statuts avaient pu être adoptés à l’unanimité comme il se doit, ainsi que la maxime régissant le comportement des “Citoyens libres de la Bilange” : “ que joie soit Loi ”! L’article 1 affirmait, sans ambages, comme premier but “s’amuser et amuser les autres. Maintenir entre les administrés de cordiales relations”. Pour éviter tout amalgame, l’article 2 précisait que “Cette commune n’a aucun rapport avec le Comité des Fêtes du Quartier”. L’article 3 édictait en règle d’or “Aucun citoyen n’aura le droit de causer politique, étant tous du même avis : rigoler”. Puis se succédaient quelques points de règlement tels que “Les citoyens désirant entrer dans la commune feront l’objet d’un examen minutieux du conseil municipal et devront, en outre, présenter des dons de bonne humeur et des qualités humoristiques”.
Faux-nez obligatoire*
L’article 5 stipulait: “Aucune cotisation ne sera perçue, la Commune étant libre, les impôts en sont bannis. En revanche chaque citoyen s’engage, suivant ses fonctions, à se munir personnellement de ses attributs et accessoires dont il aura entièrement la charge”. Dans les articles 6 et 8 c’est la tenue qui était visée : “Pour les réunions chacun sera en tenue, faux-nez obligatoire” et “sera exigée une tenue correcte et décente dans n’importe quelle circonstances sous peine de renvoi immédiat.” L’article 7 fixait le principe du lieu de réunions : “La mairie provisoire, salle du conseil, étant au premier étage du “Bar Saumurois”, Place Bilange, où seront déposées les archives. La municipalité se réserve le droit de faire ses réunions dans n’importe quelle autre crémerie, ou pharmacie, du quartier”. Enfin, toujours dans ce remarquable esprit égalitaire, l’ultime article précisait que “Les dépenses des sorties seront réparties sur les membres présents”. Ainsi bardés de certitudes, la vingtaine de participants à cette création allaient pouvoir très rapidement instaurer de toutes nouvelles traditions dans leur participation au “ retour de cavalcade ”, l’inauguration de “WC communaux”, ou encore la création des “Compagnons du Bel Humour” !
*À noter que les faux-nez étaient des accessoires fréquents dans les défilés carnavalesques de mardis gras et mi-carêmes jusqu’à la fin des années 50. C’était le cas à Cholet et à Nantes. C.P. (NDLR)
Les joyeux festivaliers du 21e siècle
Aujourd’hui, les Joyeux Festivaliers de Saumur (association) sont les héritiers légitimes de cette Commune libre de la place de la Bilange.
Lien – Joyeux festivaliers
Les bigophones
Dans le récit de Mr Jean-Paul Mandegou et dans l’article du journal, il est fait mention d’un ensemble de bigophones. Il ne s’agit pas de téléphones…
C’est Romain François Bigot (19e siècle) qui fut l’inventeur de cet instrument de musique carnavalesque simple et peu coûteux le bigophone ou le bigotphone.
Les bigophones étaient des instruments trompe-l’œil. D’abord des mirlitons : des tubes fermés à une extrémité par un papier fin tendu. À l’autre extrémité, dans le sens de la longueur, une petite fente. L’instrument se tenait le plus souvent comme un piccolo (petite flûte). Il suffisait de « chanter » entre les lèvres contre la petite fente pour obtenir le son un peu nasillard de l’instrument.
Pour habiller ces instruments, les ferblantiers (saumurois) inventaient toutes sortes de formes métalliques en y ajoutant, entre autres, un pavillon, comme celui des premiers téléphones.
Les ensembles de bigophones étaient très prisés dans les défilés que chaque quartier organisait avant la seconde Guerre mondiale. Ils sont restés en vogue encore jusqu’au début des années 60. C.P.
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